Le récit néotestamentaire de la Pentecôte à Jérusalem précise que ce jour-là des juifs de la diaspora étaient présents, parmi lesquels Mèdes, Parthes et Elamites. Ce qui correspond à des régions qui vont de l’Iran à l’Inde.
Des sources antiques évoquent l’évangélisation de communautés juives du Royaume parthe par l’apôtre Thomas et ses successeurs, à partir des routes de la soie. De nombreux brahmanes se seraient alors convertis à la foi judéo-chrétienne. Au 2ème siècle l’école théologique d’Alexandrie envoyait en Inde un missionnaire nommé Pantène, lequel a dit avoir trouvé des communautés chrétiennes déjà bien établies qui lisaient la bible non pas en grec mais en hébreu.
Au fil du temps, trois violents assauts successifs de l’islam arabe, turc et moghol pour conquérir l’Inde ont provoqué le plus grand génocide de l’histoire humaine. Certains spécialistes avancent des chiffres de plusieurs centaines de millions de victimes de cette barbarie. Vers le milieu du 15ème siècle la population était tombée à 200 millions d’individus. Les hindous furent les principales cibles de cette hécatombe.
En ce qui concerne le Pakistan, il se sépare de l’Inde hindouiste en 1947. En 1956, le nouvel état adopte une constitution qui fait du Pakistan une république islamique. L’islam est la base de ses lois et la clé de voute de son identité nationale. Ce qui explique le traitement réservé aux chrétiens autochtones depuis cette période. Près de 95% de la population est islamique.
Sur 220 millions d’habitants au Pakistan, (second plus grand pays islamique après l’Indonésie) on compte autour de 3 millions de chrétiens : 1,5 million de catholiques et 1,5 million de protestants. Selon l’ONG Portes Ouvertes, le total avoisinerait plutôt les 4 millions. Ils représentent au minimum 2% de la population. Les hindous seraient quant à eux 2%. Bien que la constitution professe sur le papier une liberté religieuse garantie, il n’en est rien dans la réalité. Depuis 1927 sous la colonisation britannique, existe une loi instituant comme crime tout acte ou propos offensant les sentiments religieux.
En 1986, sous le régime militaire du général Mohamed Zia, la loi sur le blasphème est renforcée. Toute remarque désobligeante sur le prophète ou le coran est punie de mort ou de perpétuité. On peut se débarrasser de ses voisins chrétiens en les accusant de blasphème sans même fournir de preuves. Dans les années 1990, l’hostilité anti-chrétienne s’amplifie. Le Pakistan s’électrise avec la présence de moudjahidines préparant leur prise de pouvoir à Kaboul en 1996. Les attaques se multiplient envers les chrétiens. En 2002, sept attentats terroristes visent les chrétiens : 40 morts. Les églises sont spécialement visées ainsi que les écoles chrétiennes. Des prêtres sont assassinés. Des chrétiens sont exécutés pour avoir refusé de se convertir à l’islam.
En 2010, l’affaire Asia Bibi choque l’opinion internationale. Cette mère de famille est accusée de blasphème par des villageoises musulmanes pour une simple histoire de verre d’eau, elle est condamnée à mort, mais finalement acquittée en 2018 après des années de prison, elle s’exile au Canada pour échapper aux vengeances. Shabbaz Bhatti, seul ministre chrétien du gouvernement en charge des minorités est assassiné en tant qu’opposant à la loi du blasphème. En 2011, les autorités pakistanaises exigent des télécommunications du pays qu’elles bloquent une liste de mot jugés obscènes, comme “bible” ou “Jésus-Christ”. 2015, Nauman Masih, adolescent chrétien a été brûlé vif dans la rue par de jeunes musulmans de son âge.
Les persécutions ne cessent pas. Selon l’agence vaticane Fides, chaque année 1000 femmes chrétiennes sont enlevées et converties de force à l’islam pour être mariées sans leur accord à des musulmans. Le cardinal Coutts archevêque de Karachi intente un procès en justice contre ces traites d’êtres humains. Les chrétiens ne peuvent accéder à tous les emplois dans la société, ils sont marginalisés : 80% des éboueurs du Pakistan sont des chrétiens, leur travail étant considéré par l’islam comme impur.
Récemment, à Jaranwala, 19 églises et 87 domiciles de chrétiens ont été saccagés avec brutalité. Le cimetière chrétien a été profané. Une famille chrétienne était accusée d’avoir profané le coran et l’émeute musulmane s’est déclenchée aussitôt. Des centaines d’individus vociférant et armés ont déferlé dans le quartier chrétien. Quatre églises ont été incendiées, plusieurs chrétiens ont été torturés, selon l’évêque Azal Marshal.
L’Eglise catholique au Pakistan reste très dynamique malgré l’oppression quotidienne et les persécutions. Le pays est très pauvre et le taux d’analphabétisme est de 50%. L’action de l’Eglise est bien organisée. Elle dispose d’un réseau de diocèses, d’écoles, de dispensaires, d’hôpitaux, de centres de formation professionnelle. Des lieux d’échanges avec les musulmans visent à établir des relations sociales normales.
L’Eglise pakistanaise met l’accent sur la diffusion de la bible et la catéchèse. Elle a organisé un « marathon biblique » : 2000 personnes ont lu l’ensemble de la Bible à tour de rôle en 127 heures. L’expérience a été fructueuse.
L’Eglise catholique cherche à ouvrir des instituts de haut niveau pour donner un enseignement social et éducatif. L’horizon n’a rien à voir avec les situations occidentales, puisque 65% des fidèles pratiquants ont moins de 40 ANS. Il y a beaucoup de vocations, et les prêtres sont assez nombreux pour accompagner communautés paroissiales et institutions catholiques.
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Abbé Alain René Arbez, prêtre catholique, commission judéo-catholique de la conférence des évêques suisses et de la fédération suisse des communautés israélites, pour Dreuz.info.
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